Crise au FPI : Une (si) longue histoire

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I-Des années de braise à Marcoussis…

 

Une histoire, un drame ; celui du Clan Gbagbo. Pour qui suit l’histoire du FPI depuis 1990, on peut se permettre diverses interprétations de la crise qui secoue présentement le FPI. Ce parti a diverses faiblesses dont une certaine anarchie depuis le congrès de 1996 qui a consacré la FIN du débat idéologique au profit du culte de la personnalité. Une autre faiblesse : dans l’imaginaire collectif des cadres de la première génération et la suivante, ‘’si Gbagbo est devenu président, pourquoi pas moi ?’’

 

Quand l’opposantGbagbo apparait officiellement sur le champ politique ivoirien, bousculant au passage le vieux Houphouët, son dauphin constitutionnel, son premier ministre, toute la monarchie foncière, mercantiliste du PDCI et ses démembrements, l’on aperçoit certains visages qui font figure de piliers fondamentaux, les indéboulonnables. Ce sont : MessieursBoga Doudou, Aboudramane Sangaré, OuragaObou, AhouaDonmello, Lida Kouassi Moise, BohounBouabré, Affi N’guessan, Placide Zoungrana, Molle Molle, Mmes Guéi Valère, Simone Gbagbo… Messieurs Memel-Fotèet Barthélémy Kotchi avaient déjà un certain âge. Plus tard viendra le Professeur Mamadou Koulibaly.

 

Les camarades Sangaré, Boga et Simone faisant UN avec Gbagbo, seront en vue Donmello, Affi, Lida et Koulibaly. Déjà, la guerre des héritiers connait un début lorsque le président Gbagbo laisse Koulibaly piloter la rédaction du nouveau projet de société qui bascule à 360 degrés du premier. Le FPI se taille un programme libéral que combattent Donmello and Co. Alors que Lida, Affi et Koulibaly semblaient attendre leur heure, AhouaDonmello essaie d’ajuster les pouvoirs de Gbagbo Himself. A Affi (son cousin d’Akakro), il sera remis le sabre pour le ramener au plus bas de l’échelle. Ainsi va naitre La Renaissance…

 

Quand monsieur Gbagbo accède au pouvoir, Affi, Lida et Koulibalycommencent à se faire remarquer. BohounBouabré a gardé le silence (ou presque) depuis 1996. Ces 4 cadres auront d’ailleurs les postes les plus stratégiques. Chacun d’eux est au-devant de la scène ; qui pour montrer ses compétences, qui pour prouver sa loyauté ; TOUS pour faire valoir leur capacité à gérer l’après Gbagbo. Les Camarades Laurent, Boga, Sangaré, Simone, Memel-Fotè … sont dans le rôle d’évaluateur. Revenu au FPI, le technocrate-idéologue Donmello hérite du BNETD. Il va devoir s’en contenter en attendant le Kairos….

 

17/18 septembre 2002, la Côte d’Ivoire est attaquée. Revenu au pays pour s’occuper de l’Affaire SiaPopo, Me Boga Doudou est assassiné. Gbagbo est atteint. Le FPI vacille. S’ensuivront de sombres histoires difficiles à comprendre comme la querelle Affi-Lida aux premières heures de cette attaque. Accusé d’avoir trahi Gbagbo, fait assassiner le ministre Boga pour se positionner, Lida aura tout le mal du mal à revenir à la surface. Sur la scène, à côté des ‘’Evaluateurs’’, il ne reste plus que messieurs Affi et Koulibaly.Puis vint Marcoussis. Deux tendances du FPI apparaissent au grand jour …

 

II-De Marcoussis au 22 mars 2019…

 

Le président Koulibaly claque la porte et rentre à Abidjan. Le premier ministre Affi reste à Marcoussis pour parapher l’Accord. Le FPI ne s’en remettra jamais. Koulibaly est ovationné par la Ruecratie conduite par un certain Charles Blé Goudé. Koulibaly apparait comme le SEUL capable de garder le temple en l’absence du Maitre. Affi apparait comme le traitre, le nouveau Judas. Le président Gbagbo prend acte. Affi perd son poste de premier ministre au nom de l’Accord de Marcoussis… Il lui reste entre les mains la présidence du FPI…

 

Quand éclate la crise post-électorale, une sombre histoire a éloigné les présidents Koulibaly de Gbagbo. La gestion de la rébellion aura grillé tous les potentiels héritiers du président Gbagbo. Un nouveau visage est dorénavant au-devant de la scène : le ministre Tagro. Le ministre Bohoun a finalement perdu son poste ministériel après être passé au Plan. Parmi les 5 potentiels héritiers de la Maison Gbagbo, AhouaDonmello, sauvé in extremis, devient le ministre des infrastructures économiques, porte-parole du gouvernement. Alors que TOUT Abidjan se vide, il est perçu dans le bunker, juste quelques heures avant le moment fatidique. Des souvenirs qui comptent…

 

Le FPI perd la guerre. Tous ses cadres sont arrêtés ou en exil. Seul Koulibaly est libre de ses mouvements. Devenu président (par intérim) du FPI, il a maille à partir avec sa famille politique. Le Professeur Koulibaly claque la porte et crée LIDER, un parti prônant les Valeurs de l’Ecole de Chicago après avoir été la seconde personnalité d’un parti de Gauche. Plus tard, Affi est libéré. Il prend le contrôle du FPI, essaie de lui donner une nouvelle orientation (la parabole du cercueil sur lequel s’agrippent les orphelins et la veuve). Sangaré, le Gardien du temple, s’y oppose. 2 tendances voient le jour : une conduite par Affi N’guessan ; l’autre par Sangaré.

 

Le ministre Bouhoun rend l’âme. AhouaDonmello se promène de capitale en capitale ; manquant de peu d’être extradé depuis le Cameroun. Le ministre Lida, arrêté en exil, est extradé avant de bénéficier d’une amnistie ; comme la Camarade Simone. Elle est tout de même empêchée de décider de l’Avenir du FPI. Puis arrive la date du 22 mars 2019. Parti rencontrer le président Gbagbo en liberté sous conditions à Bruxelles, Affi en est empêché. Les communiqués fusent des 2 camps. Affi décide d’animer une conférence de presse. Il s’attaque VERTEMENT au président Gbagbo. Des valeurs sures de son Clan trouvent qu’il a franchi a ligne rouge. Les démissions débutent.

 

Signalons que le Professeur Barthélémy Kotchi a pris ses distances depuis belle lurette. Le Professeur Memel-Fotè n’est plus. Le premier Cercle qui semblait pouvoir faire fléchir le Camarade Laurent a disparu. Le Comité de contrôle n’est plus que l’ombre de lui-même depuis le congrès de 1996. Le FPI s’identifie de plus en plus à une seule personne : le président Gbagbo qui a décidé de reprendre SA chose. Affi ne peut tenir dans ce bras de fer. C’est une question de mois ; peut-être d’années. D’ici là, la Côte d’Ivoire attend TOUJOURS une vraie opposition qui puisse servir de contrepoids à l’actuel Exécutif…

 

 

III-Et maintenant ?

 

La guerre est dorénavant ouverte entre les deux camps. Le président Affi N’guessan multiplie les sorties. Ses sofas sont plus que jamais déchainés. De son côté, le président Laurent Gbagbo continue de recevoir des visites selon son agenda secret. Des personnes qui l’ont traité de tous les noms d’oiseaux depuis la ‘’République du Golf’’ seraient déjà programmées. Quelles sont les perspectives qui s’offrent au FPI à partir des signaux forts actuels ? Trois pistes semblent se dessiner en filigrane.

 

1-Le président Gbagbo reçoit son premier ministre Affi avant octobre 2019 (à Abidjan ou à Bruxelles) ; soit un an avant la future élection présidentielle. La paix revient au sein de la Refondation qui se met en ordre de bataille derrière les candidats choisis. Bien évidemment, tous les militants se mettent en rang derrière la nouvelle direction de la maison rose bleu. C’est un parti soudé, fort qui pèsera lors de la présidentielle à venir.

 

2-Le président Gbagbo refuse de recevoir son premier ministre Affi. Le divorce est consommé. Le natif de Boidikro conserve précieusement le logo et se présente comme le candidat naturel du FPI. En face, les candidats sont désignés sous la bannière Ensemble pour la Souveraineté et la Démocratie (ESD). Les militants se rangent dans les deux différents compartiments devenus rigides sans aucune probable possibilité de les réunir. Divisés, ils pèseront peu lors de la présidentielle 2020.

 

3-Non seulement les deux tendances actuelles ne parviennent pas à se retrouver mais un autre groupe dissident s’aligne derrière un autre candidat issu du premier cercle du FPI en indépendant. C’est le pis des schémas qui puisse arriver à ce parti. Divisé en trois blocs, ce parti ne pourrait pas arriver au second tour. Les candidats qui arriveront au second tour négocieront séparément avec les trois leaders des trois tendances.

 

Depuis le 22 mars, le FPI se livre en spectacle. Chaque jour a son lot de ‘’révélations’’ sur les réseaux sociaux. Vrai ou faux, des secrets se retrouvent sur la place publique. Le sens de l’Etat semble avoir disparu des rangs de la Refondation. Les uns et les autres semblent si préoccupés par ce nouveau jeu que, chaque jour, c’est un boulevard qui se dresse devant le RHDP qui a même le temps d’imposer les sujets de conversation au plan national…

 

Le parti présidentiel tire profit de cette crise dans la mesure où, préoccupés à s’entredéchirer, les Refondateurs ne font aucune proposition alternative en termes de gouvernance aux électeurs. C’est plutôt à qui pourrait mieux insulter les cadres de l’autre camp. Pendant ce temps, la Côte d’Ivoire attend toujours un vrai contre-pouvoir à l’Exécutif actuel…

 

 

NB : Cet article n’est qu’une lecture personnelle. Il peut y avoir des erreurs d’appréciation. L’objectif n’est pas de distribuer des points…

 

Sylvain N’GUESSAN, Institut de Stratégies
prospectiveinfos@gmail.com

 

 

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